• Osiris

     

    1.

    Je suis le fragmenté. Celui qui a reçu l’ombre des secrets. Quelques points de reprises. Là et là. Sur le lamé de l’altérité.

     

     

    2.

    Jeté aux flots. J’ai flotté sur l’échancrure de la nuit. En cet espace où scintillent les reflets de. Myriades d’étoiles. Chacune émotion. Rage ou songe. L’envoûtant des astres. Dans lequel l’on pourrait facilement. Se noyer.

    Mémoires mises à distance. Des sources et origines.

     

    Ce qui fut vécu.

    Ou reprisé

    en tissu de légende.

     

     

    3.

    Je ne fais plus qu’un. Parfois. Avec cette eau. Cette eau qui érode les pierres et les lits. Les transformant. En poussière de temps.

    Chaque particule de poussier. Soufre et lumière. Pénètre les gerçures des mémoires.

     

     

    4.

    Fleuves et abîmes. Inapaisés.

    Inapaisés au septentrion. Inapaisés au sud. Aux levant et ponant. Et malgré.

    Chantent et dansent leurs flots.

    Je suis entré en leur horizon. Me laissant emporter. Parfois porter.

    Porté par le risque du fleuve.

    Chercher à y refonder le chant intérieur de mon unité.

     

     

    5.

    J’ai écouté les vents et leurs chants. Incrustés dans l’instant. Isis. Leur corps nous invente. Leur corps nous invite. Confins des joies et des peurs. À les voyager jusque dans les méandres de l’intime.

     

     

     

     

     

     

     

    6.

    Souvent je me suis retiré.

    Baignant dans les eaux immobiles nourricières des forêts. A chaque fois. Nécessité. De sérénité.

    Et de cette apparence de solitude.

    Une ressource.

     

     

     

    7.

    Car de solitude. Il n’en est. Accompagnés de nos âmes et de nos anciens.

     

     

     

    8.

    Se poursuit ainsi incessant. Le voyage. Et là où d’autres se seraient amenuisés. L’oubli. Ce fleuve d’émerveillement. Fut mes fondations. Mes tentatives.

     

    Sur ses rives

    de simples fleurs. Isis. Simples lotiers blancs aux ailes de grâce. En elles se déploient toute la richesse silencieuse des jours et des heurs. Celle que mes mots n’auraient su s’offrir. Pour débouter

    [Nos peurs appelant des profondeurs ce que nous redoutons le plus.]

     

    nos destinées.   

     

     

    9.           

    J’ai traversé des ciels d’ondées et d’orages. Désespérant à certains moments. Dans les eaux siréniennes des errements. De celles qui toujours nous enlisent. D’une part de nous-même.

     

    Nous et paradoxes formant une seule et même onde. Deux parts diablesses d’un même symbole. Nous. Dont seule la tranche en unifie l’existence.

    Lui conférant épaisseur et substance.

     

     

    10.

    A la recherche de mes parts.

    Eparpillées.

     

    J’ai étendu mon corps à tous les océans.

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    11.

    M’y suis répandu. M’aventurant aux rebords de l’ombre de mes chairs. Jusqu’en ces lointaines îles retirées. Où. Par défaut d’égotisme. Me furent volés mes songes.

    Oh ! oui !

    M’aventurant aux rebords de l’ombre de mes chairs. Jusqu’en ces lointaines îles retirées.

    Retrouver le sang opalescent de mon être.

     

     

     

    12.

    Les blessures tracent le chemin, Isis.

    Je suis. Parce que j’ai été. Et serai. Même devenu murmure.

    Si les chimères. Parturientes des eaux blanches. N’avaient relié certaines parts éloignées. Reliées de rêves. Reliés de saisissements et de beauté.

    Fragmenté. Et relié. Isis.

    Et par la magie des conjonctions.

    Et par cette infuse volonté.

    Mon propre mirage.

     

     

     

    13.

    Ainsi ru ruisseau rivière. Les années s’écoulèrent. Aussi fluides que la lumière. Fille et mère des ténèbres. Aussi fluides que les ténèbres. Fille et mère de la lumière.

     

     

    14.

    J’ai suivi les signes et les mots perdus. Au milieu de ces nuits qui me vagabondaient. A essayer. De comprendre ce grand puzzle de nous-même. Avant que je ne découvre. Qu’ainsi. Était mon chemin. Balisé.

    Balisé vers 

    ce seul horizon :

    être le début

    et l’issue

    de l’acceptation de soi-même.

     

     ©Géry Lamarre, 2022