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Strates successives
sédimentées
grimoire de vie
aux mille feuillets
écrit dans le langage
des minéraux
Entre chaque strate
le temps long
celui de la patience des silences
en répons à la passion des gestes
Strates
traversées de toutes ces mers intérieures
que sont nos vies
superpositions de présents
passés
devenus préambules
à de nouvelles traces de desseins
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Dialogue
graphique chimique et organique
dans lequel les matériaux proposent
leur propre pensée
une pensée-peau diaphane
se laissant transpercer
par les sombres et lumières
des propositions précédentes
Manière de penser
incarnée dans le charnel
du tableau
une écriture
se déploie dès lors
traversant la transparence
de ces dermes teintés à peines
Ou alors manières de panser
peut-être
et de cicatriser
un espace de renaissance
et de sens
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C’est le temps long
du cheminement
parcourant chaque peau-instant–pierre-feuillet
temps des coctions de ce qui fut
et germe de ce qui sera
à venir
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Les textures
en leur lente cuisson
mijotent dans le creuset
d’une correspondance
instinctive
Émulsions
d’émotions successives
qui irisent le chemin
Une lumière qui court
recouvre et découvre à la fois
la peau de notre matière-corps-âme
Apparente opposition
des épreuves
attirance / répulsion
doute/certitude
joie /malheur
violence / douceur
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Comme si ainsi associées
matières incompatibles et fluides
se remariaient au plus inconscient de ma volonté
pour me permettre de transmuer
certaines parts de moi-même
dans les profondes terres
laissées en alluvion
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Tableaux-pierres
livres de laves refroidies
dans le tendre enlacement
des intempéries de la vie
Les châssis sont volumes
corps
pierres
recouverts d’une écorce d’or
surface miroitante
de la première naissance
première matérialité
première présence
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Et puis à nouveau
recouvrir
retravailler
métamorphoser
cet incontrôlable élan
cette promesse d’un
tableau dont la fin fusionnerait à la mienne
work en continuel progress
peau neuve ou presque
couleurs traces sens
se découvrant au fil du feu de l’en- vie
Flux incessants
dans lesquelles
signes
mots
et fabliaux
s’effaceraient
au profit de l’intuition d’un chemin
le temps transperçant
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I
J’ai écouté la nuit
fatigué par le brouhaha du monde
la maison chuchote sa pénombre
un plein de vie discrète
II
La nuit est la réponse guerrière au jour
III
Nuits à peine audibles
murmure d’une rivière souterraine
IV
La nuit se déchire comme un vieux rideau
et dévoile le territoire immense de nos rêves
V
L’aile de la nuit
oscille contre ma peau
s’envole sans bruit
VI
Ma nuit t’attend de pied ferme
Alors que mon inquiétude est statue de sel
VII
La nuit est plus bavarde que le jour
c’est seulement qu’elle murmure
VIII
Je vague
sur les rivages de la nuit
flottant sur la baille de mes songes
Intervalle entre deux mondes
moment d’une délicate intensité
le temps devient océan intérieur
Espace inconsistant dense pourtant
sans repères
sans limite
et sans bruit
autres que ceux de l’ailleurs
Bruissements
embrouilles et murmures
là près loin
à l’orée d’un outre-monde
IX
FAUVE NUIT
Tapi
dans l’ombre
des clameurs du jour qui se retire
je guette la nuit
Animal à l’affût
je ressens sa présence
son aura sauvage
sans défense nuit s’avance
M’apprête à fondre
m’enfoncer dans sa jungle
m’enfoncer dans l’odorant
de ses territoires
Elle est forêt de nuages
aux lambeaux de brumes
estompant lichens orchidées
fougères épiphytes
Je la tire par les chairs
fourmis de feu des désirs nocturnes
qui dressent les cartographies
de sentes quasi surnaturelles
Elle résiste
se débat avec mes lianes-pensées
se tord finit par s’abandonner terrassée
et dévoiler les étendues de son voyage
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FORÊT XXV
Forêt d’hiver
En son sein la forêt retient la mémoire des siècles
colosses et brindilles déchus
fétus d’os par le lichen du temps recouverts
Tant d’orages aux eaux sombres ont éteint
les éclats pourpres de la terre
et pourtant de ce tapis percent
sans cesse
de fragiles germes
laissés en héritage
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